Je sens que, rien que le titre vous fait envie. Pour vous donner une idée du contexte d’écriture, Sharon écoute l’acte I de la Flute enchantée pendant que Chanel joue avec on ne sait trop quel jouet dans le salon.
Participants à la visio : Perceval et le grand écrivain au Tas de pierre, Lavinia, seconde fille de Perceval et sa seconde fille Réséda, 17 ans, Guillaume Berthier, conseiller technique malgré lui (ou policier polyvalent, comme vous voulez).
Lavinia : Je ne sais plus où donner de la tête, je suis désespérée.
Perceval : Quel est le problème, exactement ?
Lavinia : Nous serons sept adultes à table, et Alexia dit que c’est dangereux.
Guillaume et le grand écrivain, en choeur : c’est qui, Alexia ?
Gros soupirs de Lavinia. Réséda répond donc à sa place.
Réséda : Alexia, c’est la copine de ma soeur. Pardon, c’est sa fiancée, ajouta-t-elle en mimant des guillemets. Elle me court tellement sur le pédoncule que j’en oublie la manière dont elle veut qu’on la nomme. Sauf que, pour moi, une fiancée, c’est quand on va se marier, et comme elles ne veulent pas se marier, et bien, pour moi, ce n’est pas sa fiancée.
Guillaume : merci Réséda pour cette précision linguistique. Qui seront les personnes présentes ?
Lavinia : Moi et André (son mari, logique), Gentiane et Alexia, Calpurnia et Lambert (fille aînée de Perceval et son mari), Francis (ex-mari de Lavinia).
Personne ne fut choqué par cette énumération. Francis, ornithologue de son état, allait passer les fêtes de fin d’années avec son ex-femme et sa fille unique, comme il le faisait depuis des années.
Lavinia reprit : Alexia a demandé à ce que l’un d’entre nous aille manger à l’écart.
Perceval : Génial.
Guillaume : Formidable.
Lavinia : j’envisage donc de rester masquée toute la soirée, et de manger dans la cuisine.
Je vous passe sous silence les nombreuses exclamations.
Lavinia : Il est hors de question que je froisse qui que ce soit en lui disant « toi, tu manges à la cuisine ». Si j’invite Francis, c’est pour qu’il ne soit pas seul. Si Lambert n’est pas de garde au ministère (le travail de Lambert est parfois des plus obscures, mais on se doute bien que, pour être d’astreinte aussi souvent, il ne fait certainement pas du tricot), ce n’est pas pour manger dans la cuisine. Déjà que j’ai dû prendre des mesures…
Réséda : Et que le menu du réveillon ne s’annonce pas folichon !
Guillaume : Pourquoi ? Même en état végétarien, on peut faire un réveillon très agréable.
Perceval : je ne vous le fais pas dire.
Ils avaient tous en tête un certain réveillon, des années plus tôt, pendant lequel Guillaume avait subi une magistrale indigestion de gâteau.
Lavinia : Alexia a commencé un régime détox, et elle ne veut pas que le réveillon interrompe son régime.
Réséda : Eh oui, pas de bol, le réveillon tombe cette année le 24 décembre, et personne ne l’avait prévenue.
Lavinia : Pas de sucre, pas de gluten, pas de lactose. Voici mon menu :
Farandole de légumes (en fait, des bâtonnets de carottes, des tomates cerises et du chou-fleurs).
Steack de soja accompagné de purées variées (purée de carottes, d’épinard et de patate douce).
Mousse de banane.
Cookie sans gluten.
Perceval, le grand écrivain et Guillaume (en choeur) : cela m’a l’air très bien.
La bienséance nous interdit de révéler les propos de Réséda. Elle dit cependant que c’était une bonne chose qu’il y ait plusieurs toilettes dans la maison. Et ce n’est pas la peine de dire que ce n’est pas très distingué comme manière de s’exprimer. La soirée promettait d’être…. longue.
Guillaume : Cela me rappelle un ex de ma soeur. Il m’avait tellement gonflé que j’avais tondu la pelouse et je la lui avais servi. Il râlait à chaque plat, il n’avait même pas voulu de chocolat.
Perceval : Pas assez végan ?
Guillaume : Pas assez écolo, parce que les graines de cacao ne poussent pas en France. En cherchant bien, je dois pouvoir trouver sa recette de substitut de café.
Lavinia : Merci, c’est gentil.
Guillaume : Je vous en prie. (Il marqua une pause, puis se lança). Des années après sa rupture avec Juliette, j’ai eu de ses nouvelles par le plus grand des hasards. Il s’est lancé en politique pour défendre ses idées, et a même été invité sur plusieurs chaines d’info en continue. Le point positif, c’est que je n’ai qu’à changer de chaine pour ne plus le voir.
Perceval : C’est sûr.
Réséda : Si on pouvait faire la même chose avec Alexia. Ben quoi, je m’exprime, j’ai le droit aussi !