Les mots à placer sont : Essentiel, réserve, regard, félicité, observer, musique, minute, nuit, agneau, son, muet, méditation, apaiser, angoissant, justesse, jacaranda, jouer.
Le Journal d’un louveteau garou – 2 promettait un concert, le voici :
– Achevez-moi, je veux mourir !
Moi, Gaël de Nanterry, directeur du pensionnat de louveteau, soupirai
– Vous êtes déjà mort, et depuis deux cents ans seulement.
– M’en fous ! Enfoncez-moi un pieu dans le cœur, j’en peux plus !
– Je vous avais prévenu !
Il était venu à mes oreilles que Guillaume, professeur de musique et vampire, avait envisagé de faire chanter les élèves sous leur forme lupine. Autour d’un thé (pour moi) et d’un sang chaud (pour lui), je lui avais confié avoir invité, pour jouer devant nos élèves, les Gratteux de la pleine Lune.
– Purée, mais… comment ça se fait que je les connais pas ?
– Seuls les garous les connaissent. Mon père m’a emmené les voir en concert, quand j’étais ado.
Nous prîmes place dans notre loge VIP – le balcon de mon logement de fonction. Guillaume me lança un regard interrogateur, devant l’absence de sièges du « théâtre de verdure », puis il comprit à l’arrivée des élèves : tous s’étaient métamorphosés.
– Ce sera plus facile, expliquai-je, pour reprendre les chansons en chœur. Les Gratteux sont très pro. Comme le concert dure toute la nuit, ils font une petite séance de méditation avant de commencer.
Entendre 720 louveteaux battre des pattes et hurler de félicité à l’entrée en scène du groupe m’apaisa. Pas Guillaume. Après les premiers accords, il devint muet (tant mieux). Un son exquis (pour des oreilles de loup), d’une justesse inouïe jaillit des cordes. J’en profitai pour saluer Eric Trukensky et Sharon Cobert, les seuls non-garous de la salle, qui me répondirent joyeusement. Les louveteaux étaient très heureux de les savoir là, ils étaient les seuls professeurs à avoir accepté sans réserve de se rendre au concert – et d’assurer un discret service d’ordre.
Le premier morceau se termina au bout de quarante-deux minutes. Carl Jacaranda, le leader (à l’état civil Charles Coussinetordu) tint un petit discours auquel les loupiots répondirent avec allégresse. Je traduisis l’essentiel pour Guillaume.
– Toutes les chansons sont aussi longues ?
Je lui expliquai à nouveau que le groupe nous offrait ses versions courtes, pour satisfaire tous leurs fans.
Le second chant dura une heure trente, le délire s’emparait de la salle et les petits jetèrent sur scène … des preuves qu’ils étaient de véritables fans.
– Oh, c’est trop chou ! Des côtelettes d’agneau. Harold, le bassiste, les adore ! Vous voyez, le grand louveteau aux poils roux.
– Qu’est-ce qu’il va en faire ?
– Les manger !
Il se tut à nouveau, et son silence était un peu angoissant. Je l’observais, il semblait verdir à vue d’œil. Puis, il explosa littéralement :
– Achevez-moi !!!
Vous connaissez la suite.
Je l’escortais jusqu’à l’infirmerie, où il trouva calme, repos et silence. Je crois que je lui avais définitivement ôté l’envie de la monter, sa chorale de louveteaux garous. Avec eux, le début est toujours sûr, et la fin, remis à une date ultérieure.