Mon résumé : Imogène, qui croyait être débarrassée des vampires pour de bon, découvre qu’elle a ramené chez elle un métamorphe. Que faire ? Oncle Percy lance un appel à l’aide à sa soeur Maggie-Piper, retenue à Inverness.
Toute l’histoire dans la rubrique Guillaume Berthier.
Deux jours s’étaient écoulés depuis que Perceval avait envoyé cette missive à sa sœur. Nous attendions la réponse avec impatience. Nous espérions même plutôt que Maggie-Piper viendrait en personne nous tirer de ce mauvais pas. Imogène boudait. Elle boudait dans sa chambre, elle boudait devant la télévision, elle boudait dans le jardin avec une belle constance. Rufus l’accompagnait, avec toute la discrétion dont il était possible, et sans nous paralyser sur son passage, ce qui était un exploit. Je dois admettre que nous vivions dans un calme relatif, Percy et Alexander faisaient des aller-retour entre le salon et le réfrigérateur.
– Yapludpatatartiner ? s’étonna Alexander.
– Non, tu as vidé le dernier pot, commentai-je.
Il retourna donc regarder une série en streaming quand un « Bonjour, vous avez un message » nous fit sursauter.
– Un message de tata Piper ! s’exclama Alexander (oui, je sais, je pourrai l’appeler Alex, sauf que, comme sa cousine, il déteste être appelé par un diminutif).
Il nous le lut :
Bonjour à tous
Je ne peux pas revenir avant demain (mariage de Nelly + opération Ruppert + gros rhume Arthur). Je suis en train de me renseigner sur le sujet. Tenez bon !
Piper d’Arcy.
– L’allumé ! s’écria Alexander.
– L’allumé ? répétai-je, m’attirant les froncements de sourcils courroucés des McKellen, père et fils.
– Un détecteur de fantômes qui a fait rire tout le monde en affirmant que les vampires existent. Ils rigoleraient moins s’ils étaient à nos côtés, précisa-t-il en baissant le ton.
– Il a écrit des articles dans notre revue spécialisée, White Shadows, ajouta Perceval. Je ne les ai jamais lu. Je le prenais… pour un allumé.
– Au fait, demandais-je, qui est Nelly ? Et Ruppert ?
Le père et le fils se regardèrent.
– Je crois que nous allons parler de notre famille, me dit le fiston en me prenant par l’épaule. Je vous ai déjà dit que j’avais grandi dans un milieu hostile, entouré par quatre sœurs et six cousines ?
Piper poussa la porte étroite qui chancelait et pénétra dans le jardin, magnifique. Elle traversa l’allée bordée de fleurs, et aperçut l’allumé qui lui fit signe de la main. Il peignait une aquarelle, profitant de son mieux du soleil qui brillait sur l’Ecosse.
L’allumé avait un prénom : Paul. Pourtant, tout son linge était brodé aux initiales AR, en hommage à deux artistes qu’il révérait. IL faut dire qu’il semblait tout droit sorti du déjeuner des canotiers avec ses cheveux sur les épaules, soigneusement entretenus, sa blouse et sa palette multicolore.
– Piper, et il l’accueillit avec sa douce jovialité, que me vaut l’honneur de cette visite ?
Elle lui exposa la situation. Paul n’interrompit pas son ouvrage, pas même pour lui répondre. La lumière était belle, pourtant Piper ressentait une légère pointe d’anxiété au creux du ventre. Il pourrait manifester davantage d’intérêt. Certes, ce n’était pas l’existence de sa fille aînée qui est en jeu, mais tout de même !
– Piper, que sais-tu des vampires ?
– J’ai lu Dracula.
– Alors tu connais la base de la littérature vampirique, celle qui ne nous sert strictement à rien ; Oublie tout. L’ail ? Ils n’aiment pas l’odeur, mais tu auras beau dormir avec un collier d’ail autour du cou, tu ne leur causeras aucun tort. Le soleil ? Avec une bonne protection et des lunettes, il ne leur cause pas grand tort. Le crucifix ? Il peut éventuellement effrayer un vampire chrétien. Cependant, Rufus est un maître vampire, il était déjà un vampire bien avant que la chrétienté existe.
C’était peu dire que Piper avait l’air désespérée. Pourquoi était-ce toujours sur sa fille aînée qui se trouvait prise dans ces situations impossibles ? Laissez-en un peu pour les autres !
– Piper, prend conscience de la chance que tu as. D’habitude, les vampires se servent et ne préviennent pas. Ils repartent et ne laissent pas de traces. La personne se sent un peu fatiguée, puis, cela passe. Il peut arriver également qu’ils choisissent une personne, mourante, et la transforme pour en faire leur compagne. C’est très rare, mais si cela survient, c’est pour toute la mort.
Piper se sentait glacée. Elle inspira et expira profondément. Tout allait s’arranger, comment, elle ne le savait pas, mais elle trouverait. Elle remercia Paul pour ces précieux renseignements.
– Tu n’es pas curieuse de savoir comment j’ai acquis mes connaissances sur ces saigneurs ?
Piper esquissa un sourire, crispée.
– Je ne pense pas que j’ai envie de le savoir.
– J’ai une idée ! Je t’accompagne. Aurais-tu de la place pour un passager dans ta voiture ? Ne t’inquiète pas, je suis végétarien moi aussi. Tu aurais des carottes, pour la route ? *
–
*Je ne vous l’ai jamais dit, mais Imogène d’Arcy et toute sa famille sont végétariens, avec un culte certain pour la pâte à tartiner aux noisettes et la confiture de fraise.